L’équipe de la diaconie diocésaine, préoccupée par cette grave crise du logement dans l’Hérault, vous informe de l’action des EGM. Merci de l’attention que vous aurez pour cette initiative.

Plus personne à la rue ? Ensemble, on peut y arriver !

Près de 3000 personnes, dont 400 enfants, sans logement ! Où ça ? À Montpellier, en ce moment. Beaucoup sont des migrants et des mineurs non accompagnés. Pour que le plus grand nombre d’entre eux ne passent pas l’hiver dehors, les associations lancent un appel à la solidarité.

Quelles sont les situations rencontrées, quelles sont les solutions envisageables ? Commençons par trois témoignages …

Logés grâce à un propriétaire solidaire

– Tu vas bien ?
– Oui.
C’est la première fois que Tahir (tous les prénoms de la famille ont été changés) nous parle. Qu’il nous sourit aussi. Pourtant, nous nous connaissons depuis plus d’un an. Avec ses parents, Najib et Farida, et sa petite sœur, Maïda, il a quitté Kaboul à l’automne 2022, dans des circonstances difficiles. La pression des Talibans, les foules entassées à l’aéroport, les violences, l’attente, l’incertitude, l’angoisse. Ils sont passés par Paris, puis par le Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile de Montpellier qui les a installés dans un trois-pièces partagé avec trois autres occupants.
À Kaboul, avant les événements de l’été 2021, Farida était enseignante et Najib, médecin à l’hôpital. Tahir était assez grand pour aller à l’école, il avait des copains, il vivait sa vie heureuse d’enfant de quatre ans.
Au cours des premiers mois, ils ont été accompagnés dans leur nouvelle vie par des travailleurs sociaux, des bénévoles de diverses associations et plusieurs réfugiés afghans installés à Montpellier. Immédiatement, ils se sont attelés à l’apprentissage d’une langue dont ils ne savaient rien. Petit à petit, ils ont commencé à trouver leurs marques dans le quartier, dans la ville, dans la culture de leur pays d’accueil… Ils ont obtenu le statut de réfugié et les aides qui vont avec, un réseau d’amitiés s’est tissé autour d’eux, des perspectives apaisées s’esquissaient.
Mais Tahir restait inquiet, fermé, souvent sombre. On avait pu l’inscrire à l’école toute proche. Sa sœur aussi, qui avait plus de deux ans maintenant. Peut-être avait-il capté quelques échanges, peut-être savait-il, ou sentait-il, à quel point leur situation était précaire : inconfortable dans leur logement, avec le risque de devoir quitter Montpellier.
Mais grâce à des « propriétaires solidaires », nous avons vu Tahir sourire et ça lui va drôlement bien, et ça fait sacrément plaisir ! Ces gens possèdent dans Montpellier un appartement qu’ils louaient jusqu’à présent, mais que désormais ils souhaitaient vendre aussi vite que possible. Pourtant, lorsqu’ils eurent connaissance de la situation, ils revinrent sur leur projet de vente pour permettre à la famille, soutenue et cautionnée par notre association « Avec Toits », de louer ce logement en attendant d’en trouver un autre, plus pérenne, dès que Najib et Farida, ayant acquis un niveau suffisant en français et validé leurs diplômes, pourront de nouveau exercer leurs métiers de pédiatre et de professeur.
Aujourd’hui, Tahir sourit et parle. Il parle le français bien sûr, mais « aussi farsi, arabe, anglais et italien » ajoute-t-il d’une toute petite voix. Quelques mots d’un peu partout, attrapés dans sa nouvelle école, avec ses nouveaux copains et sa nouvelle maîtresse. Ils sont gentils ? Tu es content ? Oui ! Que veux-tu faire quand tu seras grand ? Je serai policier pour aider les gens et les protéger.

Une histoire tristement exemplaire

Un soir de décembre 2022, nous sommes alertés : une famille avec 4 enfants est à la rue. Le plus petit a 3 ans, celui de 7 ans est autiste et il y a deux adolescentes de 11 et 13 ans. Le père, palestinien, a demandé le statut d’apatride puisqu’il n’y a pas d’État palestinien reconnu.

Le 115 est submergé et ne propose rien. Il mettra plus d’une semaine avant de leur proposer une chambre avec six lits dans un hôtel à Sète.

Les enfants sont scolarisés à Montpellier et il est impossible de les changer d’école, car la mairie de Sète refuse de les accueillir en raison de leur adresse dans un hôtel. Les enfants se lèvent très tôt chaque matin, prennent le train, puis le tram, pour aller à l’école. Ils font leurs devoirs sur leur lit, car il n’y a pas de table dans la chambre. Ils mangent par terre. La maman lave la vaisselle dans le lavabo de la salle de bain/toilettes. Mais ils ont un toit. Cet hébergement « provisoire » va durer 10 mois.

La demande d’apatridie est acceptée. Pour le père, d’abord, puis pour la mère et les enfants. Dans son école primaire à Montpellier, une des deux filles a participé à un concours de rédaction de nouvelles. Elle a gagné un prix et a reçu les félicitations par écrit du Maire de Montpellier. À noter qu’elle ne parlait pas un mot de français un an plus tôt !

Et maintenant ? Depuis quelques mois, ils sont hébergés à Béziers par Habitat et Humanisme (fédération d’associations locales d’aide au logement). Le père a trouvé du travail à Montpellier. Il a enchaîné plusieurs CDD, jusqu’à avoir l’espoir d’obtenir un CDI comme l’a évoqué son patron… Mais celui-ci explique finalement qu’il s’agissait seulement de remplacer un de ses salariés parti en congés et donc de signer un nouveau CDD de 3 semaines.

La famille a, par ailleurs, bénéficié d’un accord SYPLO (Système Priorité Logement) sur Montpellier. Mais malheureusement, même avec un dossier prioritaire, la liste d’attente est longue, très longue…

Accueilli… pendant quelques jours

Mamadou (appelons-le comme ça) est arrivé à Montpellier début décembre. Il a quitté son pays suite à des violences familiales importantes dont il garde des séquelles, incisive cassée, cicatrices sur le torse… Il est passé par l’Italie après un périple de plusieurs mois et une traversée périlleuse de la Méditerranée sur un canot. D’origine guinéenne, il parle français. Il s’est présenté au département avec des copies de documents d’identité qui lui donnent 17 ans. Il a été refusé comme mineur au prétexte qu’il fait plus vieux et qu’il n’a pas de document original. Il n’a donc bénéficié ni de mise à l’abri, ni d’évaluation sociale en bonne et due forme. Le département, après cette procédure expéditive, l’a envoyé dans un foyer d’hébergement… qui ne prend pas les jeunes mineurs… Donc pas de mise à l’abri non plus (de toute façon, le 115 est débordé !).

Mamadou a dormi dehors tout le mois de décembre car notre association « Montpellier Accueil Jeunes Isolés Etrangers », MAJIE,  n’a plus de ressources suffisantes pour louer, en partenariat avec l’association « Avec Toits », des lieux pour mise à l’abri de ces jeunes… En fin de mois, nous avons enfin pu le mettre à l’abri chez des particuliers 6 jours, puis chez quelqu’un d’autre 7 jours, avec l’angoisse permanente de ne pas trouver de solution pour la suite.

Il mange le midi aux Restos du coeur, le soir au camion de Saint Vincent de Paul à Plan Cabane, et notre association MAJIE l’aide pour le reste de ses besoins essentiels : vêtements chauds, produits de toilette, nourriture pour le week-end…

C’est un gentil garçon, très respectueux, qui vient à l’association tous les mardis et jeudis. Il y travaille du français, un peu de maths. Le reste de son temps, il le passe à la médiathèque : il y est au chaud, il peut lire un peu, s’initier à l’informatique (merci les médiathèques!)… Il est souriant, mais forcément inquiet ; il a faim, il a froid, il est fatigué, et il ne sait pas ce qu’il va devenir (il veut être plombier)…

Nous avons pu l’inscrire au lycée, il commencera bientôt une pré-formation en alternance. Il faut vraiment réussir à stabiliser son hébergement !

Quelle est la situation à Montpellier ?

La Nuit de la Solidarité du 24 mai 2023 a permis d’obtenir des chiffres objectifs : 3000 personnes dont plus de 400 enfants étaient sans domicile, c’est-à-dire : à la rue pour 275 d’entre elles dont 8 mineurs, en squat, en bidonvilles ou encore mises à l’abri par le 115, en général pour quelques nuits plus ou moins renouvelables, dans un hôtel, un foyer d’hébergement ou un appartement qui peut être partagé. À ces chiffres, on devrait ajouter les personnes en hébergement solidaire, qui n’ont pas été comptabilisées.

Le 115 est submergé et ne peut plus répondre à toutes les urgences : dans 80 % des cas, il n’a plus de solutions à proposer aux personnes qui appellent. Le Département et l’État n’assurent plus systématiquement la continuité de l’hébergement des familles quand le dernier enfant a plus de 3 ans. Des hommes seuls sont remis dehors car non prioritaires …

Les personnes à la rue sont toujours les plus pauvres, les plus démunies : français, étrangers en situation régulière ou en demande d’asile — et étrangers en situation irrégulière. Théoriquement, une grande partie de ces personnes ont droit à un hébergement de l’État, mais en pratique ne sont pas prioritaires. Elles peuvent difficilement accéder aux logements sociaux alors même que certaines peuvent y prétendre, car beaucoup travaillent. Elles sont alors livrées aux marchands de sommeil ou aux dangers de la rue.

Dans les faits, l’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence, telle que prévue par la déclaration des Droits Humains, n’est pas respectée. C’est pourquoi les associations que nous représentons doivent prendre le relais, tant bien que mal, avec des moyens trop limités.

Vous pouvez participer aux solutions 

  • Propriétaires, vous pouvez louer votre appartement à des associations qui portent les baux de particuliers aux revenus faibles. On manque de propriétaires solidaires, alors qu’il existe la garantie de loyers et que les associations peuvent se porter garantes et suivre les locataires. Des solutions plus techniques existent comme les conventions, commodats et baux intercalaires.
  • Vous avez des pièces inoccupées : vous pouvez les mettre à disposition en accueillant quelqu’un pour quelques jours, quelques semaines ou plus si vous pouvez… C’est intéressant, gratifiant d’accueillir des jeunes. Et nos associations sont là pour vous soutenir et prendre en charge les problèmes administratifs de la personne.
  • Vous souhaitez vous impliquer, mais sans vous engager dans un accueil : nous formons un réseau de soutien sous forme de parrainage / marrainage qui permet de tisser un lien privilégié avec une personne, tout en s’appuyant sur les compétences des associations. C’est à la fois souple et adaptable aux attentes des deux parties et souvent extrêmement enrichissant.
  • Vous pouvez participer à héberger une personne ou une famille en soutenant financièrement les associations Avec Toits (https://avec-toits.org/) ou MAJIE (www.majie.org)

Qui contacter ?

Avec Toits : avectoits@ouvaton.org  / 07 66 54 80 26 / https://avec-toits.org

MAJIE (Montpellier Accueil Jeunes Isolés Etrangers) : contact@majie.org / 07 58 38 32 46 / https://majie.org

Collectif Migrants Bienvenue 34 : migrants.bienvenue34@riseup.net  / https://www.facebook.com/collectifmigrantsbienvenue34/

Ces trois associations font partie des États Généraux des Migrations, EGM, qui se sont unis au Pacte du Pouvoir de Vivre pour créer un collectif pour répondre plus efficacement à cette question de l’hébergement et du logement des personnes les plus précaires, en particulier les migrants.